Fenêtres

Texte de Jean-Christian Fleury

Fenêtres

Pour Pierryl Peytavi, la photographie est d'abord un champ d'expérimentation qui permet de transfigurer la réalité dite objective, de s'en affranchir pour affirmer ce qu'il nomme
un "regard spontané", une subjectivité dans toutes ses dimensions.
Il fait jouer comme des variables les conditions matérielles de notre vision et ses composantes psychologiques.
Si, dans la série Routes, il saisit le paysage depuis un véhicule, soumettant la vision fugitive aux contraintes du déplacement, avec Fenêtres, c'est le paysage urbain le plus commun qu'il tente de cerner, photographiant depuis les fenêtres de bâtiments à l'abandon, dont les cadres redoublent celui de l'appareil photo et dont les vitres crasseuses interposent leurs filtres.
Pierryl Peytavi bouleverse ainsi les notions de dehors
et de dedans, morcelle les vues urbaines parfois jusqu'à l'insignifiance.
Il met à distance le réel relégué, par le jeu de la mise au point, au statut de fantôme, voire de fantasme.
Par cette vision de myope – qui est effectivement la sienne-, le photographe restitue une "image-sensation" en noir et blanc dont la sensualité tactile doit beaucoup aux qualités plastiques des verres où le temps a déposé ses sédiments.
Une poésie de la ville qui ne doit rien à l'anecdote ou à la nostalgie des banlieues naît de l'indécision des formes, de la pauvreté des informations recueillies, de ces images archétypales qui semblent des évocations familières et lointaines.